Les Millers - Une famille en herbe
Suite à un malheureux concours de circonstances, David (Jason Sudeikis), dealer de son métier, est dépouillé par des voyous de toute sa précieuse marchandise. Peu commode, son patron lui propose de se racheter en allant chercher une cargaison de came au Mexique.
Paniqué par cette mission suicide qui dépasse ses compétences, David a soudain une idée lumineuse: il va jouer au bon père de famille, parti avec les siens passer des vacances en camping car. Pour former sa famille modèle, il soudoie une stripteaseuse dans le besoin (Jennifer Aniston) et engage deux ados un brin marginaux…
Ce quatuor mal accordé passe la frontière et s’efforce de gagner le repaire d’un redoutable baron de la drogue… Grâce à ce stratagème, le réalisateur de «Même pas mal!» (2004) peut passer au laminoir burlesque les valeurs morales ressassées par le cinéma américain «mainstream», tout en caressant l’utopie d’une famille d’un nouveau type, que l’on aurait librement choisie…
Adeline Stern
Train de nuit pour Lisbonne
Tourné en partie à Berne, le dernier film du Danois Bille August est tiré du roman de Pascal Mercier, nom de plume de l’écrivain suisse Peter Bieri… Par un soir pluvieux, le professeur de latin Raimund Gregorius (Jeremy Irons) sauve la vie d’une jeune Portugaise prête à se jeter d’un pont de la capitale fédérale.
En fuyant, la jeune femme oublie son manteau avec, à l’intérieur, un livre et un billet de train pour Lisbonne. Espérant la retrouver, le professeur se rend sur le quai de la gare à l’heure indiquée par le billet, mais elle ne vient pas. Intrigué, il décide de prendre sa place dans le wagon et commence la lecture du livre qui le fascine, tant les pensées de son auteur, un certain Amedue de Prado, semblent proches des siennes…
Deux fois lauréat de la Palme d’Or à Cannes, le réalisateur de «Pelle le conquérant» a réussi à recréer l’ambiance très singulière du livre d’origine, en s’appuyant sur de grands acteurs, tels Bruno Ganz, Mélanie Laurent ou encore Charlotte Rampling!
Vincent Adatte
La Danza de la Realidad
Complice du bédéiste Moebius et agitateur en chef du groupe «Panique» qu’il fonda avec les sieurs Topor et Arrabal, le Chilien Alejandro Alejandro Jodorowsky a défrayé la chronique au cours des années septante, en tournant des films délirants comme le western psychédélique «El Topo» (1970) ou «La Montagne sacrée» (1973), chef-d’œuvre ésotérique s’il en est!
Après vingt-deux ans de jeûne cinématographique, ce cinéaste fou nous revient enfin, égal à lui-même, avec cette «Danse de la réalité» où il tente de restituer l’incroyable aventure et quête que fut sa vie, dans un exercice d’autobiographie imaginaire complètement sidérant!
Né au Chili en 1929, dans la petite ville de Tocopilla, où le film a été tourné, Jodorowsky restitue à sa manière l’éducation très dure (et violente) dont il fut victime, au sein d’une famille de déracinés, histoire de conjurer les vieux démons tant qu’il en est encore temps… Avec, à la clef, un essai cinématographique à nul autre pareil.
Vincent Adatte
Le Majordome
D’ores et déjà désigné comme l’un des grands favoris de la prochaine course aux Oscars, le quatrième long-métrage du réalisateur noir Lee Daniels s’inspire librement du parcours par trop exemplaire d’Eugene Allen, le majordome qui officia à la Maison-Blanche sous huit présidences…
En 1952, désireux d’oublier un passé douloureux, Cecil Gaines (Forest Whitaker) s’engage au service du Président des Etats-Unis. Pendant plus de trente ans, cet homme humble et discret va vivre de l’intérieur les grands événements historiques du pays…
Pour durer dans sa fonction, Cecil va se faire littéralement invisible, observant dans le Bureau ovale la règle implicite qui veut qu’un Noir doit éviter de se faire remarquer pour être toléré par les Blancs. En prenant part à la bataille des droits civiques, son fils va dénoncer de façon explicite cette attitude servile qu’il juge pour sa part inacceptable… Un biopic plein d’humanité dont Obama en personne écrira l’ultime chapitre!
Adeline Stern
Alabama Monroe – The Broken Circle
Adapté d’une pièce de théâtre qui a connu un succès retentissant en Belgique flamande et aux Pays-Bas, le quatrième long-métrage du cinéaste Félix Van Grœningen («La Merditude des choses») raconte l’amour fou et le deuil sur un air de bluegrass…
Didier (Johan Heldenbergh, l’auteur de la pièce) et Elise (Veerle Baetens) s’aiment avec passion. Ils se sont rencontrés dans le salon de tatouage d’Elise, puis retrouvés au concert de country music du groupe «Broken Circle Breakdown», où Didier joue du banjo. Depuis lors, ils ne se sont plus quittés, vivant à la campagne, à l’écart de la société aliénante…
Devenue chanteuse du groupe, Elise file avec Didier le bonheur parfait, jusqu’au jour maudit où ils apprennent que Maybelle, leur petite fille de six ans, est frappée d’une maladie sans doute incurable… Un mélodrame d’une intensité déchirante, traversé par la musique qui en est l’une des «actrices» principales! Personne n’en ressortira indemne!
Adeline Stern
Rush
Samedi 12 octobre à 20h30, la projection sera suivie d’une discussion avec des pilotes de rallye et d’un apéritif. Prix de la soirée 15.-
Tout au long de la légendaire saison 1976, deux pilotes d’exception vont se disputer la première place du championnat du monde de Formule 1. Tout les oppose. Issu de la bonne société, l’Anglais James Hunt (Chris Hemsworth) est un play-boy charismatique, au panache indéniable.
Réservé, méthodique et calculateur, l’Autrichien Niki Lauda (Daniel Brühl) se montre plutôt avare en gestes flamboyants, préférant la réflexion à l’ostentation… Sur les circuits, leur rivalité va prendre un tour dantesque, offrant un suspense quasi intolérable!
Cinéaste chevronné, qui a débuté dans les années septante, Ron Howard se sent manifestement très à l’aise dans cette reconstitution très fouillée d’une époque où le fric n’avait pas encore gangrené la compétition automobile. Evitant le piège du manichéisme, le réalisateur de «Cocoon» et de «Apollo 13» réussit à tenir en haleine le spectateur jusqu’à la ligne d’arrivée, que l’on ait ou non en détestation le «grand cirque motorisé»… Impressionnant!
Vincent Adatte
Les Grandes Ondes
Vendredi 4 octobre à 20h30 le film sera suivi d’une discussion avec le réalisateur et du verre de l’amitié.
Second volet d’une tétralogie déclinant les points cardinaux, «Les grandes ondes (à l’ouest)» révèle ce que l’on pressentait depuis longtemps: Lionel Baier possède une verve comique irrésistible, digne des grands classiques signés Ernst Lubitsch, Howard Hawks, ou Marcel Pagnol, sans oublier les Louis de Funès et autre Pierre Richard dont les films populaires ont déridé son enfance!
Pour calmer l’ire d’un conseiller fédéral alémanique qui juge la radio romande peu patriote, un directeur d’antenne (Jean-Stéphane Bron) envoie en avril 1974 trois journalistes louer les bienfaits de l’entraide suisse au Portugal, alors que se trame la révolution des Œillets. Julie, une journaliste féministe, et Cauvin, un vieux baroudeur macho, retrouvent là-bas Bob, un preneur de son qui a fait le voyage dans son combi Volkswagen.
Rattrapés in extremis par la grande Histoire, ils contribueront chacun à leur manière à la cause… Avec un trio d’acteurs magnifiques, Baier réussit avec panache une comédie jubilatoire, tout en gardant intacte sa griffe d’auteur!
Vincent Adatte
Gabrielle
Samedi 28 septembre à 18h, le film sera suivi d’une discussion sur le thème avec «Insième Vaud» Association de proches de personnes handicapées mentales.
Gabrielle (Gabrielle Marion-Rivard) est une jeune femme douée d’une joie de vivre qui peut sembler paradoxale! Atteinte du syndrome de Williams, elle est membre d’une chorale constituée de personnes frappées de diverses déficiences et chante de façon admirable. Cette chorale travaille d’arrache-pied pour être en mesure d’accompagner le chanteur Robert Charlebois dans le cadre d’un concert exceptionnel.
Au cours des répétitions, Gabrielle tombe amoureuse de Martin (Alexandre Lamy), handicapé lui-aussi. Elle revendique dès lors plus d’indépendance pour vivre pleinement sa relation. Las, la mère de Martin ne semble de loin pas prête à accepter que son fils connaisse les joies du sexe…
Grâce à l’engagement incroyable de sa protagoniste, la cinéaste canadienne Louise Archambault réussit à marquer sa fiction au sceau de la réalité la plus tangible. Prix du Public à Locarno, «Gabrielle» fait un sort magnifique à la bien-pensance qui prévaut hélas trop souvent dans ce genre de contexte.
Vincent Adatte
Grigris
Unique réalisateur tchadien en exercice, seul cinéaste africain vraiment présent à Cannes ces dernières années, Mahamat-Saleh Haroun poursuit une œuvre absolument indispensable, dédiée au quotidien de son pays miné par l’héritage du colonialisme et une guerre civile incessante.
Après «Un Homme qui crie», Prix du Jury à Cannes en 2010, qui racontait le dilemme du fils d’un maître-nageur dans un hôtel de luxe à Ndjamena, le réalisateur de l’imparable «Daratt» (2006) nous propose un nouveau joyau de la même eau rugueuse, qui illustre toute la complexité des réalités de l’Afrique contemporaine, désormais plus urbaine que campagnarde!
Jeune homme de vingt-cinq ans à la jambe paralysée, Grigris danse dans les discothèques de la capitale tchadienne pour gagner sa vie. Il tire avantage de son handicap en se livrant à des chorégraphies impressionnantes. Empêtré dans un trafic d’essence, il va voir son existence déjà très précaire menacée…
Vincent Adatte
Riddick
Laissé pour mort sur une planète inconnue, l’ex-détenu Richard B. Riddick (Vin Diesel) a tôt fait de reprendre ses esprits. Las, un environnement pour le moins hostile ne lui donne guère de répit, survie oblige!
Avec le laconisme qui le caractérise, Riddick extermine sans faire de chichis une myriade de créatures démoniaques très voraces, lesquelles se reproduisent à la vitesse des tornades qui balaient sans relâche cette contrée déjà guère hospitalière. La situation se complique encore avec l’arrivée de deux bandes rivales de chasseurs de primes fort peu amènes, qui vont rivaliser en alliances instables…
Réalisé par le talentueux David Twohy, à qui l’on doit l’excellent et très frissonnant «Pitch Black» (2000), ce troisième épisode des aventures de notre héros nyctalope est de très loin le meilleur de la série! Visiblement, son protagoniste s’éclate comme un gosse, jouant de façon éhontée avec tous les clichés du genre!
Adeline Stern