Quittant la préhistoire de L’âge de glace (2002), Chris Wedge nous embarque avec son nouveau long-métrage d’animation 3D dans un futur uniquement peuplé de robots facétieux. Ce virtuose de l’image de synthèse nous raconte l’histoire de Rodney Copperbottom, adorable poupon tout en ferraille, livré en kit et monté façon «ikea» par ses parents aux anges.

En grandissant, Rodney se découvre une vocation d’inventeur. Brûlant de mettre son génie créatif au service du plus grand nombre, il quitte sa ville de province pour rallier la capitale où il cherche à entrer en contact avec Bigweld, véritable pape de la robotique débrouillarde, qui veille à la bonne marche de ses pairs automates. Notre idéaliste se heurte alors à l’inquiétant Ratchet qui a pris la place du mentor débonnaire de Robot Ville. Ratchet projette de mettre fin au bon vieux système des pièces de rechange, pour imposer le diktat de la mise à jour.

Cette nouvelle politique constitue une catastrophe pour la classe défavorisée. Incapables de se payer une mise à jour au-dessus de leurs moyens, les robots les plus démunis sont bons pour la casse… Agrémenté d’un zeste de réflexion sociale, Robots huile de façon très efficace les rouages de nos zygomatiques.

Vincent Adatte

Film d'animation * Age légal 7 ans / suggéré dès 7 ans

Ray Charles Robinson, figure emblématique de la soul music, du jazz et du rythm'n' blues, est décédé le 10 juin 2004 en Californie, à l’âge de septante-trois ans. Surnommé «The Genius», aveugle depuis l'âge de sept ans, il a composé quelques-unes des chansons les plus mémorables de la musique noire américaine. I got a woman, Georgia on my mind, Unchain my heart ou encore Hit the road Jack constituent autant de succès incontournables.

Basé sur l’homme bien plus que sur ses tubes, Ray retrace l’histoire du célèbre crooner. De son enfance difficile à la façon dont il a créé ses titres les plus célèbres, en passant par ses problèmes avec la drogue et les femmes, ce long-métrage pétri de swing et de blues décrit l'itinéraire d'un être qui a réussi à surmonter son handicap de façon exemplaire. L’acteur Jamie Foxx, qui prête ses traits au «Genius», semble totalement habité par son rôle, atteignant à une véritable osmose qui va bien au-delà de la ressemblance physique.

A noter que Ray a été entrepris avec l'accord de Ray Charles lui-même, qui fut un observateur attentif d'une grande partie de la production du film. Il insista même pour qu'on lui procure le scénario en braille.

Nicolas Chevalley

Avec Jamie FOXX, Kerry WASHINGTON, Clifton POWELL * Age légal 12 ans / suggéré dès 14 ans

A Londres, de nos jours, quatre amants, fieffés menteurs, mènent une drôle de sarabande. Présentons les protagonistes très aisés de ce chassé-croisé amoureux virtuose dont l’issue sera plutôt amère: dermatologue, Larry (Clive Owen) est épris d’une photographe prénommée Anna (Julia Roberts). Stripteaseuse de haut vol, Alice (Nathalie Portman) aime Dan (Jude Law), un journaliste et écrivain qui se pique de manipuler les êtres et les sentiments. A mesure que se développe cette comédie faussement romantique, qui exhale l’air un brin cynique de notre époque, le spectateur prend conscience que ce quatuor bon chic bon genre ne saurait se contenter de sentiments aussi simples!

Adapté d’une pièce de théâtre créée en 1997, Entre adultes consentants est l’œuvre d’un cinéaste d’expérience qui en sait long sur nos illusions sentimentales. Venu de la scène, en activité depuis une quarantaine d’années, Mike Nichols a très vite aligné les films marquants sur le sujet – Qui a peur de Virginia Woolf (1966), Le lauréat (1967), Ce plaisir que l’on dit charnel (1971), etc. Dans son dernier film porté par des acteurs au sommet de leur art, il surprend par un traitement très original du temps, tour à tour étiré, condensé, accéléré, qui dit bien le désordre amoureux qui prévaut aujourd’hui.

Vincent Adatte

Avec Julia ROBERTS, Jude LAW, Natalie PORTMAN * Age légal 16 ans / suggéré dès 16 ans * VO sous-titrée

A cinquante ans passés et treize longs-métrages à son actif, le réalisateur français Robert Guédiguian continue de cultiver son atypisme. Actif depuis le début des années quatre-vingt, l’auteur de Marius et Jeannette est sans doute l’un des derniers cinéastes tricolores à se soucier encore du «politique». Tour à tour véhément (La ville est tranquille), faussement naïf (L’argent fait le bonheur) ou franchement mélancolique (Dernier été), cet ex-militant du parti communiste a tracé une série de variations souvent très réussies sur le seul thème de la fin des utopies (avec le travail de deuil que cela suppose).

Avec Le promeneur du Champ de Mars, cette thématique atteint à des hauteurs poignantes, grâce au personnage de François Mitterrand dont le destin cristallise les attentes et désillusions de toute une génération de Français. Non sans audace, le cinéaste a librement adapté le livre de Georges-Marc Benamou, «Le dernier Mitterrand»… A sa demande, un jeune journaliste idéaliste presse de questions le futur ex-Président. Se sachant condamné par la maladie, ce dernier ne lui confie que doutes et incertitudes. L’extraordinaire Michel Bouquet joue son rôle de façon fascinante, au point que l’on se demande si ce ne serait pas Mitterrand qui l’aurait pris pour modèle!

Vincent Adatte

Avec Michel BOUQUET, Jalil LESPERT, Philippe FRETUN * Age légal 10 ans / suggéré dès 14 ans

Aïe, Greg (Ben Stiller) et Pam (Blith Danner) ne sont toujours pas mariés! Le pauvre Greg pensait avoir vécu le pire lors de sa première entrevue avec ses beaux-parents… Il lui reste pourtant une épreuve autrement redoutable: présenter ses propres parents aux géniteurs cinglés de sa promise!

Cette rencontre classée à haut risque va donner matière à des péripéties rocambolesques, car les camps en présence diffèrent du tout au tout: les parents baba cool et sexuellement très libérés (joués par Dustin Hoffman et Barbra Streisand) de notre brave infirmier sont en effet aux antipodes du terrible beau-père, ex-agent de la CIA et particulièrement psychorigide (Robert de Niro).

Cette suite très attendue de Mon Beau Père et Moi est un must à ne rater sous aucun prétexte! A moins que vous ne souhaitiez avoir l’air complètement décalé lors d’une prochaine discussion «fou rire», où une bonne âme ne manquera pas de raconter l’un des gags mémorables du film. Par exemple, celui où le chat du beau-père tire la chasse d’eau, pour le plus grand malheur du toutou de la très aimante madame Focker!

Adeline Stern

Avec Robert DE NIRO, Ben STILLER, Dustin HOFFMAN, Barbra STREISAND * Age légal 7 ans / suggéré dès 12 ans

Rien ne va plus dans le sombre empire d’Hébalon. L’empereur se donne la mort dans des circonstances mystérieuses, léguant à son fils le soin de combattre les Zériths, leurs ennemis ataviques. Mais des courtisans frustrés vont lui tendre un piège… Le cinéaste danois Anders Ronnow-Klarlund nous conte une histoire de trahison à la Shakespeare sur fond d’«heroic fantasy».

Ainsi résumé, Le Fil de la vie (Strings) paraît un brin ténu. S’il remporte néanmoins nos suffrages, c’est grâce à sa facture exceptionnelle. À l’ère du tout numérique, les cent marionnettes à fils de cette superproduction totalement artisanale n’ont rien d’obsolète. Au contraire, manipulées par des experts en la matière, elles acquièrent peu à peu une présence assez extraordinaire!

Après un prologue où le cinéaste révèle volontairement les coulisses de l’exploit en filmant l’activité des manipulateurs, le spectateur bascule dans un univers fantasmagorique très crédible. Ronnow-Klarlund réussit cet effet de réalité étonnant en dotant ses têtes de bois d’une conscience aigue de leur condition. Elles savent tous qu’elles ne sont que des marionnettes et que leur vie ne tient littéralement qu’à un fil!

Vincent Adatte

Age légal 10 ans / suggéré dès 10 ans

Un ouvrier agricole (Benoît Delépine) déteste son voisin, un beauf de première grandeur (Gustave Kervern) qui préfère choyer sa moto plutôt que sa femme. Un beau jour, le motard perd son travail, sa femme et les pédales. Il passe alors ses nerfs sur les plates-bandes de son voisin. Les deux énergumènes en viennent aux mains. Dans la mêlée, une benne agricole fait des siennes, laissant les deux combattants sur le carreau et parfaitement paraplégiques. Après avoir songé au suicide chacun de leur côté, nos deux handicapés se retrouvent par hasard sur un quai de gare. Malgré leur haine mutuelle, ils décident d’entreprendre ensemble un long périple en fauteuil roulant, jusqu’en Finlande pour demander réparation à Aaltra, la société finlandaise responsable de la benne défectueuse…

D’un genre très particulier, ce «road movie» filmé en noir et blanc est l’œuvre subversive des deux membres fondateurs du mythique et décapant «Groland» (Canal +).

Avec une constance jamais prise en défaut, leur satire reste bête et méchante jusqu’au bout: très peu charitable, elle ne suscite aucune fausse compassion, sinon le fou rire (très jaune) du spectateur qui reçoit en pleine poire ce pamphlet grinçant contre la médiocrité.

Sylvie Johner

Avec Benoît DELEPINE, Gustave KERVERN, Benoît POELVOORDE, Noël GAUDIN * Age légal 10 ans / suggéré dès 14 ans

Alex Hitchens dit Hitch (Will Smith) exerce une activité pour le moins originale: il prodigue, aux hommes les plus timides, des conseils censés leur permettre de conquérir la femme de leur vie. Son dernier client, Albert (Kevin James), simple comptable, est tombé éperdument amoureux de la richissime Allegra (Amber Valetta). En guidant Albert dans sa campagne de séduction, Hitch tombe sur Sara (Eva Mendes), une journaliste «people» qui suit Allegra comme son ombre. Notre conseiller ès stratégies amoureuses a alors un véritable coup de foudre qui lui ôte tous ses moyens, au point que les précieux conseils qu’il donne aux autres ne lui seront d’aucun secours…

Cette comédie qui fait un éloge réconfortant de la timidité offre à Will Smith un rôle comique dont la tendre décontraction tranche sur son registre habituel (Independance Day, Men In Black, etc.). Ne cherchez rien de plus dans ce charmant divertissement, si ce n’est une envie de tomber amoureux qui nous saisi à sa vision… C’est le printemps !

Francine Pickel

Avec Will SMITH, Eva MENDES, Kevin JAMES * Age légal 7 ans / suggéré dès 12 ans

Avec Yagira YUYA, Kitaura AYU
Age légal 10 ans / suggéré dès 14 ans

En 1988, une affaire fait grand bruit au Japon: pendant six mois, une mère immature abandonne à leur sort ses quatre enfants dont seul l’aîné a été déclaré à la naissance. Pendant tout ce temps, les quatre gosses survivent sans aide extérieure. Claustrés dans un appartement exigu, ils nouent entre eux une solidarité étonnante. Ce fait divers retient toute l’attention du réalisateur Hirokazu Koré-eda qui pense déjà à en faire un film. Des années plus tard, devenu l’un des cinéastes majeurs de son pays, Koré-eda passe à l’acte et nous sidère avec «Nobody Knows» («Personne ne sait»).
Sur un mode réaliste, proche du documentaire, l’auteur de «After Life» retrace les étapes de ce drame de l’«indifférence ordinaire». Toujours à hauteur d’enfant, il réussit la gageure de nous mettre en profonde empathie avec Akira, Kyoko et les autres, tout en gardant ses distances, sans juger. Cette réserve est essentielle car elle nous permet de prendre conscience du caractère scandaleux et inéluctable de la situation… Saccage d’une enfance traversée par des fulgurances poétiques qui serrent le cœur, «Nobody Knows» est le seul film qui a fait pleurer Cannes l’an passé!

Adeline Stern

Avec Michaël YOUN, Jacques VILLERET
Age légal 7 ans / suggéré dès 10 ans

«Je veux être Calife à la place du Calife!» En 1962, René Goscinny et Jean Tabary lancent pour la toute première fois cette phrase historique en donnant naissance au grand Vizir dans les colonnes des journaux Record et Pilote. Ce personnage malveillant, lâche, cruel, et odieux n’a qu’une idée en tête: prendre la place du Calife Haroun El Poussah par tous les moyens, même les plus insensés…
Quarante ans plus tard, Patrick Braoudé écrit un scénario original s'inspirant des personnages de la BD et s’entoure d'un casting étincelant mais très cathodique, qui réunit le regretté Jacques Villeret, Michael Youn, Arno Chevrier, Magloire, Kad & Olivier, Rufus, Franck Dubosc, Bernard Farcy, Elsa Pataky, Juliette Poisonnier. Commencé en mars 2004, le tournage a duré 15 semaines et a fait grouiller dans de fastueux paysages marocains près de 8000 figurants. Produit parfaitement calibré, cet Iznogoud brille plus par ses effets spéciaux (500 plans truqués), ses décors et costumes somptueux que par son humour très référentiel qui s’adresse en priorité aux accros du petit écran.

Adeline Stern