Synopsis
De la projection du vingt-neuvième long-métrage de Clint Eastwood, l’on émerge étreint par une émotion identique à celle qui nous avait saisis au sortir de Million Dollars Baby, à la différence près que ce cinéaste bientôt octogénaire a administré à Gran Torino une sacrée dose d’autodérision.
Le film commence dans une église de la banlieue de Détroit: vétéran de la guerre de Corée, ouvrier à la retraite des Usines Ford, Walt Kowalski enterre sa femme. Droit dans ses bottes, Walt grogne des imprécations contre ses petits-enfants délurés, le trop jeune curé en charge de l’oraison. Plus tard, sur la terrasse de sa baraque où flotte la bannière étoilée, il déverse sa bile sur ses nouveaux voisins, des «bridés», des «faces de citron», morigénant ce quartier «américain» devenu un ghetto pour immigrants démunis.
L’opinion du spectateur sur ce «Polak mal torché» semble faite: infréquentable, fait d’un bloc de haine et de ressentiment! En un peu moins de deux heures, le réalisateur d’Impitoyable va alors accomplir une démonstration éblouissante, en amenant ce personnage irrécupérable à une rédemption insoupçonnée… On n’en dira pas plus, sinon que ce chef-d’œuvre se termine par un climax dévastateur pour le spectateur, conférant à ce drôle de drame une dimension crépusculaire.
Adeline Stern